Reproduire une peau malade pour chercher de nouveaux traitements
Grâce au financement de l’AIF (5000 €), Alexis Charbinat, étudiant-ingénieur à l’INSA de Toulouse, a pu réaliser son stage de fin d’étude dans l’équipe de recherche de Nathalie Jonca, au sein de l’Institut Toulousain des Maladies Infectieuses et Inflammatoires (Infinity), partenaire du centre de référence des maladies rares de la peau et des muqueuses de Toulouse.
Afin de pouvoir tester de nouveaux traitements, il est nécessaire de disposer de « modèles de peau », capables de reproduire fidèlement l’épiderme d’un patient atteint d’ichtyose. Ces modèles sont difficiles à obtenir, ce qui est un frein à la recherche en laboratoire. Cette difficulté est due notamment à l’existence de nombreuses formes différentes d’ichtyose, au petit nombre de patients (maladie rare) et à l’impossibilité d’avoir accès à de nombreuses biopsies de peau malade pour obtenir les cellules de la peau appelée kératinocytes.
L’objectif du stage d’Alexis a été de développer des épidermes humains « reconstruits in vitro » sans utiliser de la peau de patients. Nous avons pour cela utilisé des kératinocytes « immortalisés » (lignée cellulaire NTERT), que l’on peut cultiver « indéfiniment » au laboratoire.
Dans une première étape, nous avons montré qu’il était possible de fabriquer des épidermes reconstruits in vitro à partir de ces cellules NTERT et que ceux-ci présentaient les mêmes caractéristiques qu’une peau normale.
La deuxième étape a consisté à « rendre malade » les cellules NTERT, c’est-à-dire à les rendre identiques génétiquement à des cellules de patients en modifiant les gènes. Ceci est en effet possible à l’aide d’une technologie de pointe appelée « édition du génome ». Il s’agit d’utiliser de véritables « ciseaux moléculaires » grâce auxquels on peut reproduire les anomalies génétiques responsables d’ichtyoses. Nous avons ainsi réussi avec succès à muter, dans les cellules NTERT, un gène appelé PNPLA1, connu pour être muté dans certaines ichtyoses.
L’étape suivante consistera à produire des épidermes reconstruits in vitro à partir des cellules NTERT mutées, puis de vérifier qu’ils reproduisent les défauts typiques d’un épiderme de patients atteints d’ichtyose.
Ce travail montre qu’il est possible de produire des nouveaux modèles in vitro d’ichtyose reproductibles, fiables et performants. Il sera également possible, en utilisant les cellules NTERT, de produire « sur mesure » de nombreux autres modèles d’ichtyose, adapté à toutes les nombreuses formes de cette maladie, qui résultent d’une mutation dans d’autres gènes que PNPLA1. Ces modèles seront particulièrement utiles pour étudier les mécanismes de l’ichtyose et développer de nouveaux traitements.
Ce travail a été sélectionné pour une communication orale au prochain Congrès Annuel de Recherche en Dermatologie (CARD 2021), en juillet prochain.
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